Législation
héraldique aujourd'hui _
Le
droit et les usages des armoiries
LEGISLATION
HERALDIQUE AUJOURD'HUI
A l'heure actuelle,
toute personne, famille, groupe ou collectivité est en
droit de porter des armoiries, qu'elles soient anciennes ou nouvellement
créées. La jurisprudence en matière d'héraldique
reconnaît, par un arrêt de la cour d'appel de Paris
du 20 décembre 1949, que "les armoiries sont des marques
de reconnaissance accessoires du nom de famille auquel elles se
rattachent indissolublement". Les armoiries obéissent
aux mêmes lois de transmissibilité et de concession
que le nom de famille et sont conjointement protégées
contre toute usurpation.
Le port darmoiries par des particuliers est dusage
courant dans de nombreux pays dEurope. Les pays scandinaves,
la Suisse et lEcosse sont exemplaires en la matière.
Ensuite viennent les Pays-Bas, la Belgique, et le Royaume-Uni,
monarchies où subsistent des collèges héraldiques
veillant à la conservation du patrimoine armorial et à
lobservance des usages héraldiques dans la réalisation
de nouvelles armoiries. Le sud de lEurope semble moins disposé
à faire état darmoiries particulières,
le fait héraldique y étant moins prégnant
ou réputé, en particulier en France, comme une exclusivité
du corps de la noblesse disparu juridiquement. Dune façon
générale, ladoption et le port darmoiries
reste libre et licite, laissant à chacun le droit de se
composer des armoiries selon son envie et den faire usage,
ces armoiries constituant légalement une propriété
privée contiguë au nom. Bien que reconnaissant lusage
des armoiries, la justice républicaine répugne à
se mêler dhéraldique. Les litiges concernant
lusurpation darmoiries sont peu nombreux depuis un
siècle, renvoyant le plus souvent les plaignants dos à
dos. Larrêt de justice rendu en 1988 lors du procès
opposant Henri dOrléans à ses cousins Ferdinand
de Bourbon-Sicile et Sixte-Henri de Bourbon-Parme sur le port
des armoiries de France sans brisure montre assez bien les raisons
de ce désintérêt : " Attendu qu'il n'appartient
pas à une juridiction de la République d'arbitrer
la rivalité dynastique qui sous-tend en réalité
cette querelle héraldique, comme l'ensemble de la procédure
; Attendu qu'en tout état de cause, le demandeur, qui ne
peut ainsi avec pertinence soutenir qu'Alphonse de Bourbon se
servirait du "symbole" de la France, ne prétend
nullement que le port de ces armes sans brisure, qui résulte
d'un usage ouvert et constant des Bourbons d'Espagne depuis plus
de cent ans, soit à l'origine pour lui-même ou sa
famille, d'un préjudice actuel et certain ; que dans ces
conditions, Henri d'Orléans, qui ne justifie pas d'un intérêt
à faire interdire le port de ces armoiries, sera déclaré
également irrecevable en sa demande de ce chef."
Les prétentions
nobiliaires justifiées ou fantaisistes entourant le port
darmoiries et la difficulté de traiter dobjets
honorifiques historiques dont la propriété peut
être à la fois commune et particulière représente,
pour les tribunaux républicains soucieux de légalité
entre les citoyens, une véritable gageure. Ainsi les trois
fleurs de lis dor sur fond dazur jadis attachées
à la qualité de Roi de France sont réputées
avoir disparu avec elle en tant que symbole de la France. Elles
sont tombées dans une certaine mesure dans le domaine public.
Dune façon générale, les armoiries
sont considérées comme un attribut du nom et jouissent
de la même protection que le nom lui-même. Les tribunaux
compétents pour examiner les litiges relatifs aux noms
patronymiques sont également compétents pour connaître
des contestations qui peuvent être soulevées au sujet
des armoiries. Malgré la reconnaissance légale des
armoiries, aucun organisme officiel nest habilité
à enregistrer ladoption de nouvelles armoiries. La
Commission nationale dhéraldique, placée sous
la présidence du directeur des archives, a pour mission
de renseigner les collectivités souhaitant adopter des
armoiries sur les usages héraldiques. Ses attributions
se bornent au conseil. Les communes sont libres du choix définitif
de leurs armoiries et de leur diffusion.
L'adoption d'armoiries
nouvelles par des communes ou des particuliers n'est assujettie
à aucune formalité administrative ; leur usage à
long terme instaure de facto le droit de les porter. Sans être
une obligation, ladoption darmoiries peut saccompagner
dun acte notarié ou faire lobjet dune
annonce dans la presse ou dune publication dans un armorial
privé comme le Conseil français dhéraldique
ou la Maintenance héraldique de France, le dépôt
sous archives notariales ou le dépôt légal
des publications pouvant rassurer la mentalité française,
volontiers friande de ratification administrative, en fixant une
date certaine à ladoption darmoiries nouvelles.
Plus innovante est la publication darmoiries en ligne sur
lInternet. Quelques sites comme le Grand Armorial, s'efforçant
de réunir de nombreuses sources armoriales, tant anciennes
que modernes, sont ouverts aux nouvelles armoiries. Leurs mises
à jour régulières et leur accessibilité
via le net permettent de rendre publiques rapidement à
lensemble des internautes sensibles à la généalogie
et lhéraldique les nouvelles adoptions darmoiries.
Lornementation extérieure des armoiries, cimier,
casque couronne, manteau, collier ou supports, devise ou cri de
guerre sont également libres dutilisation. La Commission
nationale dhéraldique, adepte de la simplicité,
déconseillera néanmoins leur usage et interdira
formellement les colliers dordre et les décorations
de la République si le porteur darmoiries ne peut
en faire état de plein droit. Les devises, les cris et
les cimiers seront considérés avec mansuétude,
et les couronnes et les casques, considérés comme
des attributs dancien régime, recevront peu dencouragement.
Il est à noter que dans certaines monarchies européennes,
en particulier au Royaume-Uni où subsiste encore un corps
nobiliaire, ces mêmes attributs restent attachés
à la concession et à la confirmation de titres de
noblesses par le souverain. Les collèges de hérauts
darmes de ces pays sont aussi habilités à
enregistrer officiellement les armoiries de leurs ressortissants.
Bien que ladoption darmoiries soit permise, leur enregistrement
par les collèges de hérauts darmes conserve
un caractère restrictif, prenant en considération
la reconnaissance des qualités du porteur darmes
lors que celles-ci ne sont pas directement concédées
par le souverain. Le Canada, qui par son histoire et son engagement
dans le Commonwealth reste toujours attaché à la
couronne britannique, ce qui lui permet, outre son bilinguisme,
de se différencier de son voisin américain, entérine
le port et lenregistrement darmoiries pour les Canadiens
ayant apporté une contribution à leur pays ou au
monde. La concession d'emblèmes héraldiques par
la Couronne du Canada montre assez bien le caractère électif
des enregistrements darmoiries par un collège de
hérauts darmes, qui permet aux Etats en possédant
de rendre hommage à des particuliers et à des organismes
pour leurs actions remarquables.
LE
DROIT ET LES USAGES DU BLASON
ADOPTION
D'ARMOIRIES
L'envie
d'une personne, d'une famille, d'une collectivité ou d'une
association de créer et d'adopter des armoiries est parfaitement
légitime. Les armoiries, par leur fort pouvoir symbolique,
permettent d'évoquer de nombreuses situations. Elles peuvent
commémorer
une légende familiale, sacraliser une alliance, un changement
d'état, la continuité d'une profession à
l'intérieur d'une famille ou encore permettre d'évoquer
des qualités personnelles ou d'arborer ses propres couleurs.
L'adoption et la création d'armoiries sont libres et licites.
Elles s'entourent néanmoins de quelques précautions
dues au respect des usages héraldiques, à la jurisprudence
en matière de port d'armoiries et à la modération.
LA
JURISPRUDENCE
Chacun
est en droit de se composer des armoiries selon son envie et den
faire usage, ces armoiries constituant légalement une propriété
privée contiguë au nom. Les armoiries, marques de
reconnaissance accessoires du nom de famille auquel elles se rattachent
indissolublement, obéissent aux mêmes lois de transmission
et de concession que le nom de famille et sont conjointement protégées
contre toute usurpation. L'adoption d'armoiries nouvelles par
des communes, des associations ou des particuliers n'est assujettie
à aucune formalité administrative ; leur usage à
long terme instaure de facto le droit de les porter. L'usage de
colliers dordre et de décorations de la République
dans l'ornementation extérieure des armoiries n'est acceptable
que si le porteur darmoiries peut en faire état de
plein droit.
LES
USAGES HERALDIQUES
Le blason
est un système de signes abstraits ou figuratifs parés
de couleurs franches, les couleurs proprement dites et les métaux
se combinant entre eux à l'intérieur de l'écu,
révélant plusieurs usages. Le premier usage consiste
à reprendre une ou plusieurs armoiries antérieures
afin d'évoquer une alliance ou un lien familial, accompagnées
de modifications si les armoiries anciennes sont toujours légitimement
portées par un tiers. Le deuxième usage consiste
à traduire graphiquement le patronyme du porteur d'armoiries
par un rébus héraldique. Il s'agit d'armes parlantes
qui, dans une période où peu de gens savaient écrire,
fut à l'origine de nombreuses armoiries médiévales.
Le troisième usage consiste à synthétiser
les aspirations, les origines et les goûts du porteur d'armoiries
aux travers de différentes figures héraldiques.
Enfin, ajoutons un quatrième usage, l'envie d'arborer une
figure héraldique plutôt qu'une autre sans avancer
d'autre raison que le bon plaisir du porteur d'armoiries.
MODERATION
L'adoption
et l'usage d'armoiries offrent dans de nombreux cas la possibilité
de mettre à l'honneur les origines régionales du
porteur d'armes, sa généalogie et ses qualités
véritables ou supposées. La fierté d'être
normand ou d'être breton peut amener certaines personnes
à insérer dans leurs armoiries les deux léopards
d'or sur gueules de Normandie ou l'hermine plain de Bretagne.
L'usage dans leur intégralité des armoiries régionales
devrait cependant être modéré, eu égard
aux anciennes maisons, quand elles subsistent, qui conservent
sinon un droit, du moins une ancienneté à porter
ces armoiries, et aux régions mêmes. L'utilisation
des couleurs de ces armoiries (l'or et le gueules pour la Normandie
et l'argent et le sable pour la Bretagne) ou l'usage d'un ou deux
éléments de ces armoiries suffiront à les
évoquer. De même, la reprise d'armoiries anciennes
afin d'évoquer une filiation réelle ou supposée
(un vieil adage nous faisant tous descendre de Charlemagne) ou
par homonymie patronymique devra être modérée
par un changement de couleur, une disposition différente
de ces éléments ou par l'ajout d'éléments
brisants. Parallèlement aux armoiries proprement dites,
l'art héraldique a développé à des
fins décoratives une série d'ornements extérieurs,
cimier, casque, couronnes, manteau, collier, supports, devise
ou cri de guerre. Certains de ces éléments devront
être utilisés avec modération ; les couronnes,
pour leur réputation d'attributs dAncien Régime,
et les colliers dordre et les décorations de la République
seront prohibés si le porteur darmoiries ne peut
en faire état de plein droit.
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